Quelques passages du livre :
« Amoureuse.
Rien, aucune créature au monde n’est plus ridicule, et déplaisante, qu’une fille amoureuse : du matin jusqu’au soir, elle sourit vaguement, prunelles clignotantes et bouche entrouverte. De temps à autre, l’amoureuse rougit (sans doute pense-t-elle, la pauvre chérie, à des caresses jugées par elle scandaleuses). Ou alors elle grimace : ce doit être la jalousie qui vient lui mordiller le cœur. » (p. 13)
« - Le conditionnel ne fait jamais, jamais confiance. Le conditionnel n’arrête pas d’imaginer le contraire de ce qui se passe. Dario ne m’aimerait plus. Dario s’intéresserait à mon argent. Les poules auraient des dents …
- Quelle horreur ! Comme vous avez raison, Amandine ! Supprimons le conditionnel. On peut lancer une pétition ?
- Je vous aime et vous m’aimez, n’est-ce pas Dario ?
- Bien sûr, Amandine.
- Alors, pour nous, plus rien n’existe que le présent, l’indicatif présent. » (pp. 37-38)
« Je l’avoue, jamais je n’aurais dû me montrer si vive, à la limite de l’impolitesse. Mais comment imagine qu’un quasi-nain puisse surplomber quoi que ce soit ? » (p. 42)
« D’après ce que je vois, nous souffrons, vous et moi, de la même maladie grave : la curiosité. Vous savez que le mot « curieux » vient du latin cura : le soin ? Soyons fiers de notre défaut : être curieux, c’est prendre soin. Soin du monde et de ses habitants. » (p. 42)
« - C’est drôle : pour savoir « où », on répond « quand ».
- Tu as raison. Peut-être que, dans l’air, le temps et l’espace se marient. » (p. 54)
« Les pensées qui restent emprisonnées dans le cerveau manquent d’air. Celles qu’on fait passer dans la bouche et jette dans l’air respirent mieux, forcément, et gagnent en clarté. » (p. 61)
« - Vous savez donc où se trouve mon frère ?
- Dans l’île du Subjonctif.
- Pourquoi là-bas ?
- Parce que c’est le pays des rêves. Un garçon qui part, qui part sans revenir, c’est toujours à cause d’un rêve.
- Je vais le retrouver, les retrouver tous les deux. Votre frère et le mien. Et ils vont m’entendre : on n’a pas le droit d’abandonner sa sœur. » (p. 88)
« - Commençons par le plus simple, l’endroit où tu habites : l’Indicatif, c’est ce qui existe.
- Ca, je sais. Ce qui existe, ce qui existé, ce qui existera. Du concret. Du certain. Du réel.
- Parfait ! Nous, les Subjonctifs, nous nous intéressons au possible. Ce qui pourrait arriver. En bien ou en mal. Je veux qu’il vienne. Je doute qu’elle guérisse. » (pp. 118-119)
« - Le rêve est une bataille, Jeanne. Je veux parler des vrais rêves, bien sûr, pas des petits désirs qui nous passent dans la tête et y volettent comme des moustiques.
- Qu’est-ce qu’un vrai rêve ?
- C’est un rêve qui dure. Et s’il dure, c’est qu’il s’est marié. Marié avec la volonté. » (p. 120-121)
réalisé par Cédric
le 24 juin 2013